« L’Eternel devant qui je me tiens est vivant ! »
C’est une chose à la fois si simple et si mystérieuse, si paisible et si intense, que de se tenir devant Dieu ! Dans cette saison de « reset », c’est une chose à laquelle Dieu m’invite spécialement, mais je crois que cette invitation est pour nous tous.
Tout a commencé avec cette proclamation qui tournait en moi encore et encore : « l’Eternel devant qui je me tiens est vivant… » C’est une expression utilisée par Elie par deux fois dans 1 Rois 17:1 et 1 Rois 18:15. Mon esprit était spécialement attiré par « devant qui je me tiens ». Cela faisait écho à ce que l’ange dit dans Luc 1:17 au sujet de Jean-Baptiste, l’Elie qui a précédé Jésus : « il marchera devant Dieu… »
Je ressentais qu’il y avait une nouvelle dimension à vivre et je me suis mise en route pour le découvrir…
Dans cet appel à réapprendre à se tenir devant Dieu, j’ai retrouvé l’appel des sacrificateurs : « l’Éternel sépara la tribu de Lévi, et lui ordonna de porter l’arche de l’alliance de l’Éternel, de se tenir devant l’Éternel pour le servir, et de bénir le peuple en son nom. » Deutéronome 10:8
Se tenir devant l’Eternel est une tâche suffisamment importante pour qu’elle soit notifiée ici, alors que la Torah rappelle le sens de la mise à part de la tribu de Lévi. Elle est fortement liée aussi au fait que Dieu dit des sacrificateurs qu’ils lui appartiendront, qu’ils seront attachés à lui et qu’ils seront exclusivement au service sa personne.
En hébreu, l’idée de se tenir devant Dieu s’apparente à la position des serviteurs. On retrouve cette notion dans Genèse 18, lorsqu’ Abraham accueille puis sert ses trois visiteurs. Il leur prépare à manger, les sert, puis se tient là, discrètement à côté d’eux, suffisamment proche pour pouvoir répondre s’ils appellent, et suffisamment attentif pour pouvoir aider aussi vite que nécessaire. C’est vraiment une position de service.
Pourtant, la plupart du temps, les serviteurs qui « se tiennent » là ne font rien. Ils sont juste là. Ils se tiennent en présence de leur maître pendant qu’il fait ce qu’il a à faire. Leur rôle est d’attendre le moment où ils sont soudain appelés pour être immédiatement présents pour répondre.
Le fait de se tenir là pour lui est une marque d’honneur et une déclaration qu’il mérite toute notre attention et tout notre service. Nous lui appartenons, avec toutes nos forces et tout notre temps.
Alors je me suis reposée la question : devant qui est-ce que j’ai conscience de me tenir ? En général, j’ai très conscience de tous ceux qui sont autour de moi, de leurs attentes, de leurs désirs et de leurs besoins. Et trop souvent, les désirs, les attentes, les besoins et l’honneur dû à Dieu passent après…
Au début du mois de juin, j’ai eu l’occasion d’entendre prêcher Johannes Hartl, le fondateur de la maison de prière d’Augsburg en Allemagne. Il prêchait sur le verset de Matthieu 6:6, où Jésus enseigne que pour prier, il faut entrer dans sa chambre et fermer sa porte, pour rencontrer le Père qui nous attend là, dans le lieu secret. Il attribuait cette recommandation de Jésus au fait qu’à cette époque, les gens étaient très imprégnés des mauvaises habitudes des pharisiens qui faisaient beaucoup de choses de manière à être vus, y compris la prière. Le fait de ramener la prière dans le lieu secret nous permet de retrouver le coeur de celle-ci : une conversation avec Dieu où il est l’objet de toute notre attention !
Se tenir devant Dieu ne se passe pas sur la place publique ou sur les lieux de passage. Cela s’apprend dans l’intimité de notre maison, ou de nos maisons de prière, loin de tous les regards qui pourraient nous admirer… ou nous désapprouver. Nous avons tellement besoin de redonner à Dieu sa place. En tant que sacrificateurs, nous l’honorons lorsque nous acceptons de nous affranchir des regards et des désirs des autres pour nous consacrer à nous tenir devant Dieu et sous son seul regard, et à répondre à ses désirs.
Se tenir devant Dieu impose de rassembler toute notre attention, de concentrer sur lui notre affection, et d’attendre. Il y aurait beaucoup à dire sur chacun de ces points !
S’arrêter veut dire pour commencer arrêter de s’agiter. Ce n’est pas un plaidoyer à une forme quelconque de passivité, c’est une décision de cesser de remplir l’instant de tout ce que nous pourrions faire, pour nous recentrer sur Dieu et sur sa réalité de toute la force de notre être. On peut s’agiter en s’affairant dans des choses futiles, mais avec le temps, je découvre qu’on peut s’agiter même dans la louange ou dans la prière. Il y a de ces moments où la présence de Dieu est si forte qu’elle devrait nous conduire à être très humbles et très prudents dans ce que nous disons et ce que nous faisons. Mais parfois, contrairement à cela, nous sommes gagnés par l’angoisse de ne pas faire, dire, jouer, prier ce qu’il faudrait, alors on se transforme en une sorte de mitraillettes de mots, de sons, de mouvements, de prières, de manifestations, espérant que quelque chose au milieu de tout cela pourrait plaire à Dieu et lui donner envie de rester !! (je ne peux pas m’empêcher de rire en écrivant ces lignes, en repensant à plusieurs moments où j’ai exactement fait cela il n’y a pas si longtemps !)
Alors j’apprends. J’apprends à calmer cette agitation en moi, et à concentrer tout mon être pour porter toute mon attention, toute mon affection, et toutes mes pensées vers Celui devant qui je me tiens. Parfois il faut juste repousser une pensée après l’autre, parfois je dois choisir de faire l’effort nécessaire pour ne pas laisser mon attention être occupée par autre chose, parfois encore j’utilise quelque chose qui m’aide : proclamer son nom, chanter et répéter une même prière, ou le regarder et contempler.
L’agitation est une maladie de notre chair. Le meilleur moyen que j’ai trouvé pour la faire taire dans cette saison est de lui accorder aussi peu de pouvoir que possible. A chaque fois qu’elle sème la dispersion et la distraction, ou à chaque fois que je sens une forme de paresse spirituelle venir, je choisis de ne pas l’écouter et de mettre toute ma volonté du côté de la nouvelle création que je suis, qui aime Dieu, cherche Dieu, a soif de Dieu et se réjouit de se tenir devant lui. Et à chaque fois qu’une pensée ou une idée vient m’attirer ailleurs, je me contente de revenir dès que je m’en rends compte.
Nous faisons cesser l’agitation en nous en apprenant à attendre devant Dieu.
Dans cette saison, j’apprends à me tenir devant Dieu et à l’attendre. Je me tiens là, parfois il se passe quelque chose qui me concerne, parfois pas. Mais à l’instant où il m’interpelle, je veux réagir tout de suite et de toutes mes forces. Je ne veux pas laisser l’habitude, la longueur, ou quoi que ce soir me voler ces moments-là !
Parfois, je redécouvre que Dieu a simplement du plaisir à être avec moi. Être. Nous ne savons plus très bien ni ce que ça veut dire, ni à quoi ça peut bien servir. Pourtant je réalise avec le temps que quelque chose se passe, sans que je puisse dire quoi, si j’accepte d’être. Être simplement avec lui, être présente maintenant, être avec lui. A l’heure d’aujourd’hui, je suis incapable de dire ce qu’il se passe dans ces moments-là, mais je sais une chose : quelque chose en moi est fortifié, transformé, la substance de mon être augmente, je deviens plus consistante, plus réelle et plus vivante.
Je découvre aussi que si j’apprends à me tenir, Dieu lance des conversations que nous n’aurions peut-être jamais eues. Il vient et il pose une question, ou bien il lance un sujet. Parfois il vient reparler de quelque chose que j’ai fait, ou bien il me prépare à ce qui est devant. Une autre fois, il révèle son coeur et je ressens sa compassion pour une situation. Tout cela se produisait déjà, mais pas avec la même profondeur ni la même régularité.
Et surtout, j’apprends à laisser Dieu décider de la fin de la conversation.
Nous avons beaucoup de peine à vivre cela. La plupart du temps, le temps que je consacre à Dieu s’achève parce qu’il y a un autre programme après dans mon agenda, qui m’impose de me remettre en route. Du coup, c’est un peu comme si j’ai un RDV avec Dieu, et c’est super, mais c’est toujours moi qui décide du moment où ça s’arrête. A plusieurs reprises, j’ai réalisé que Dieu essayait de me faire rester un peu plus que d’habitude, et trop souvent, j’ai fini par partir quand même parce qu’autre chose m’attendait, me laissant quand même un goût d’inachevé. Un peu comme si tu regardes un film et que tu dois partir juste avant le dénouement…
De même, dans ces derniers mois, nous avons plusieurs fois ressenti une présence forte de Dieu dans certaines rencontres. Je me suis efforcée de répondre en me tenant devant lui, et en attendant simplement. Mais le plus souvent, il a fallu prendre soin en même temps de ceux qui poussaient pour faire quelque chose, pour passer à la suite, ou même il fallait libérer les gens pour partir puisque c’était l’heure de la fin de la rencontre. J’ai rêvé qu’au moment où je le faisais, personne ne bougerait. Mais dans la majorité des cas, à la minute où les personnes étaient libres de rester ou de partir, elles se sont levées, sont sorties de ce que nous étions en train de vivre, et se sont plongées dans une discussion, un rangement, ou sont simplement partis. Moi inclus.
Je me suis plusieurs fois demandée ce qui se serait passé si nous étions restés, car je suis presque sûre que Dieu aurait fini par nous dire quelque chose…
Se tenir devant Dieu, c’est aussi retrouver notre place dans le temps et le présent de Dieu. Lorsque je parviens à trouver cette position intérieure dans laquelle je suis présente à moi-même et présente à Dieu, je deviens très consciente de la réalité d’en haut au moment même dans lequel je me trouve. Je deviens plus consciente aussi de mon environnement, mon discernement s’aiguise et je perçois beaucoup mieux ce qui se passe autour de moi dans le monde invisible. Cet aspect d’être présente au présent, plutôt que présente au passé ou à l’avenir, m’apparaît du plus en plus comme une clé importante à redécouvrir. Le temps tout entier existe devant Dieu, mais c’est à partir du présent que Dieu nous ouvre les portes vers le passé ou l’avenir. Si nous sommes retenus par notre âme dans le passé, ou au contraire si elle nous pousse à nous préoccuper et trop anticiper le futur, nous ne sommes pas dans le présent. Dieu est « Je suis », c’est son nom, il se révèle dans chaque présent.
Lorsque nous avons appris à nous tenir ainsi devant Dieu dans notre esprit, nous pouvons développer cette position tout au long de notre journée, et quelque soient nos activités !
Dans 1 Rois, lorsqu’ Elie apparaît à Achab et le salue de cette manière : « l’Eternel devant qui je me tiens est vivant ! », il décrit une double localisation. D’un côté, il est sur la route, devant Achab. De l’autre côté, il se tient devant Dieu.
C’est une étape qui nous amène vers une nouvelle autorité lorsque nous sommes capables de nous tenir sur les chemins terrestres en même temps que devant le trône de Dieu. La plupart du temps, on est conscient de l’un ou de l’autre. Mais Elie a réussi à trouver le chemin qui lui permet d’être consciemment à la fois en haut et en bas, dans le ciel et sur la terre.
L’onction d’Elie, c’est aussi cette capacité à être parfaitement établis dans les lieux célestes, et parfaitement opérationnels sur la terre. Mais faire deux choses en même temps, ça s’apprend !
Dans la saison que nous traversons, nous avons besoin de trouver nous aussi ce chemin à travers le ciel ouvert, où nous pouvons être en même temps sur terre et faire face à chaque situation de manière pertinente, et en même temps devant l’Eternel qui nous parle, nous missionne et agit en notre faveur ! A chaque fois que nous vivons cela, nous devenons un ciel ouvert et le règne de Dieu est libéré au travers de nous d’une manière surnaturelle. Que Dieu nous donne d’être un peuple qui se tient devant lui à toutes les heures du jour et de la nuit en même temps qu’il marche sur la terre et y manifeste son Royaume.